Pourtant merveille patrimoniale, l’église Saint-Erasme ne fait pas partie des lieux populaires d’Ajaccio. L’édifice ne peut compter que sur quelques bénévoles pour charmer ses rares visiteurs de la semaine. Ses bienfaiteurs œuvrent durement pour son entretien
Rue Forcioli-Conti, 9 h 30. Derrière une grande porte en bois marron, l’imposant lustre s’illumine et laisse paraître un étonnant spectacle. La particularité de Saint-Erasme, construite en 1617, c’est cette trentaine de maquettes de bateaux et de navires. La plupart sont suspendues au plafond de l’église. L’édifice est dédié aux pêcheurs et à tous les hommes de la mer. À l’intérieur, s’y dressent la version originale de Notre-Dame de la Miséricorde, ainsi que d’autres trésors associés à la vie maritime, tel que Saint-Pierre censé protéger les pêcheurs. Saint-Erasme est largement moins grande que son édifice voisin, la cathédrale Santa Maria Assunta. Elle est choisie par une équipe très restreinte de bénévoles.
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Brigitte et sa fille Andréa déambulent le long de l’autel. La mission du jour : nettoyer les sols et retirer les décorations de fleurs installées pour un mariage récent. « Nous entretenons l’édifice tous les jours, été comme hiver », insiste François Idda, président de l’association Amis de Saint-Erasme et troisième prieur de l’église. Aux côtés de sa femme, de sa fille âgée de 18 ans et de ses deux frères parfois, il ouvre les portes de l’église chaque matin et gère son accès aux visiteurs. Le petit effectif de bénévoles, composé de quatre à cinq personnes, arrive difficilement à maintenir l’édifice ouvert tous les jours et tout au long de l’année. L’après-midi, les portes restent closes.
Une faible vitesse
Ce vendredi matin, un seul groupe d’une vingtaine de personnes, ainsi qu’une poignée de visiteurs, ont franchi les portes de la petite église. Seulement quelques guides touristiques incluent dans leur parcours un arrêt à Saint-Erasme, bien souvent oubliée des indispensables de la ville. François Idda regrette le faible intérêt dû derrière cette église de marins. « Les gens la délaissent, elle est pleine seulement au moment de la Saint-Erasme, le 2 juin »se désole-t-il.
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Il partage son dévouement avec le reste de sa famille. Son grand-père était premier prieur de l’église. Il le rappelle : Saint-Erasme est partout présent dans sa vie, « jusqu’au sticker collé sur mon téléphone ! »indique François en montrant la coque de son mobile.
Et pourtant, malgré ses efforts, il peine à gérer convenablement l’entretien de l’église. Aucune aide financière n’est attribuée par la communauté des pêcheurs d’Ajaccio ou par les pouvoirs publics, regrette-t-il. Pour accomplir quelques travaux nécessaires, les bénévoles organisent en saison deux concerts par semaine dans l’enceinte de l’édifice. Une participation de 20 euros est demandée à chaque spectateur. Une vitrine disposée à l’entrée propose des bracelets, des colliers et des petits modèles des Saints de l’église.
Besoins de rénovation
Le prieur espère néanmoins voir ses rêves de restauration réalisés. « Qui ne tente rien n’a rien », répète François Idda en détaillant son projet. Les premiers chantiers ont été réalisés depuis quinze ans mais plusieurs parties de l’édifice restent délabrées ou à moitié restaurées. Son extérieur a été rénové mais une partie de l’édifice blanc s’abîme.
À l’intérieur, les murs repeints à plusieurs reprises dissimulent un des trésors de l’église. « Des travaux ont permis de découvrir des fresques. Un devis a été réalisé pour les découvrir totalement mais son prix nous a stoppés net, c’est donc à l’abandon », résume le prieur. Avec l’aide des autres fidèles, il constitue actuellement un dossier patrimoine et espère récupérer des subventions.
Le peu d’activités religieuses participe également à la faible visibilité de Saint-Erasme. La semaine dernière, l’église a accueilli une de ses rares cérémonies. Le mariage d’un homme de la mer, employé au service pilotage du port. « Peu de personnes savent que l’on peut célébrer des cérémonies ici et c’est surtout que tout dépend du prêtre et de son autorisation », explique François Idda. Le prieur espère d’ailleurs lui-même pouvoir organiser le baptême du petit-fils de sa femme : « Je me prépare dès maintenant ! »